lundi 22 septembre

Toujours le regret que Baudrillard ne soit plus là. A la place, on a des "spécialistes" qui brodent sur les récits officiels sans les déconstruire. Personne pour envisager les communiqués du pouvoir comme des indications scénaristiques précises, faisant l'objet d'une très grande attention de la part de la cellule de communication. Pour que la fiction puisse infuser dans le réel (ou ce qu'il en reste), le relais des journalistes est indispensable. Passage en boucle, éditos, 20 heures, flashs de nuit... Parmi les journalistes, on peut distinguer les ambitieux - qui mettent de la conviction pour donner corps aux récits les plus improbables - et ceux qui tentent de conserver un minimum de dignité - en laissant entendre discrètement, dans le ton de la voix, qu'ils ne sont pas dupes des dépêches qu'ils doivent lire.

mardi 23 septembre

A l'approche de l'hiver, il n'est pas mauvais de se donner un thème de réflexion. Surtout si l'on est, comme moi, sujet à une certaine dispersion. Il convient de choisir une problématique suffisamment vaste pour avoir l'assurance de la retrouver partout et en toute situation (le temps, l'existence, l'espace...). L'intérêt avec ces questions ayant survécu à toutes les réponses apportées, c'est que vous pouvez les reprendre tranquillement à zéro.

mercredi 24 septembre

"Au point où elles en sont aujourd’hui, les autorités américaines ne peuvent plus se permettre de perdre la moindre bataille, de faire la moindre erreur de stratégie et de communication. L’hégémonie monétaire du dollar, fondamentalement contestée, est à la merci de la moindre erreur et ceci sans qu’une solution de rechange ne soit disponible à court terme."
Pendant ce temps, le feuilleton financier continue. Derrière la prétendue "folie des marchés", il y a une méthode et un système. Avec cet article, technique mais clair, on saisit mieux pourquoi les discours qui nous paraissaient bidons sont effectivement archi-bidons.

Commencé la lecture de Contre-jour. Le ton fait penser au précédent livre de Pynchon : distance ironique, point de vue surplombant, complicité du narrateur avec le lecteur. Comme ils disaient l'autre jour à la radio : du Pynchon "accessible". Cela ressemble à un roman d'aventure à l'ancienne raconté dans le style fleuri et accrocheur des feuilletonistes du dix-neuvième siècle. Le temps d'entrer dedans plus avant et on en reparle.

jeudi 25 septembre

« Je n'ai jamais perçu la littérature autrement que comme mise en réflexion de ce qu'on ne comprend pas du monde." François Bon

vendredi 26 septembre

Aujourd'hui : rude journée en extérieur. Se dire que ces expéditions permettent de mieux apprécier le retour au basement.

samedi 27 septembre

Le rôle du langage en tant que procédure de mise à distance et de contrôle apparaît plus clairement dans les périodes où, comme maintenant, je ne suis pas très loquace. La réduction drastique du volume des interactions directes peut avoir une incidence. Il est également possible que l'expérience récente ne joue aucun rôle décisif. Tout cela est tellement mystérieux.

dimanche 28 septembre

lundi 29 septembre

Peut-on mettre les mots et les concepts momentanément à distance, réduire leur puissance de recouvrement ? Que se passe-t-il lorsqu'on renonce à l'illusion selon laquelle nous rendons compte des choses lorsque nous les nommons ? C'est un peu ça, la problématique générale pour cet hiver. Je serai amenée à parler d'un philosophe roumain que j'ai découvert par hasard en feuilletant le livre à la librairie la Hune.

mardi 30 septembre

Vu La vie des autres, film bien fait qui résonne au-delà de la situation historique évoquée (Allemagne de l'Est, Stasi, dissidents, vodka). Vu ensuite quelques banquiers sur des plateaux de télé. La chute de la bourse atteignait presque celle du 11 septembre au soir. Les banquiers cherchaient à trouver quand même des raisons de rester optimiste. On nous annonce peut-être une journée historique pour demain. Quel suspens !

mercredi 1 octobre

"Les places boursières rebondissent dans l'espoir d'un nouveau plan de sauvetage" (Le Monde). En matière d'intox, les stratégies rudimentaires utilisées pendant la guerre froide sont loin derrière nous. Aujourd'hui, on construit des récits avec des séquences, des surprises, des retournements de situation - comme à Hollywood. Plans sur des façades d'établissements financiers, traders speedés, écrans qui clignotent. La chute de l'économie spectaculaire-marchande n'est pas très télégénique pour l'instant. A suivre...

jeudi 2 octobre

On peut écouter l'intégrale de Tell Tale Signs ici. Pas désagréable du tout, ces chutes de studio. La demo de Most Of The Time semble sortie de Wold Gone Wrong (on mesure au passage le travail de production de Lanois sur Oh Mercy). Mais de là à ressortir le cliché de l'"America's greatest living songwriter", il y a un pas. Le consensus qui s'est installé sur le sujet depuis quelques années commence à devenir pesant. Overrated ? On peut se poser la question tant l'ampleur de la reconnaissance dépasse la mesure. J'ai apprécié d'entendre une voix s'élever dans le désert du conformisme ambiant. Hélas, l'argument utilisé pour relativiser le songwriting de Bob (les textes sont faibles parce qu'ils n'ont aucun sens) est un peu étroit.

vendredi 3 octobre

Les interprétations de la "grave crise financière" sont variées, mais il y a une constante : le sentiment d'une fin. Beaucoup veulent croire que c'est pour mieux repartir, encore plus fort. Si ça casse, ça risque de tanguer; mais si ça passe, ce n'est guère mieux.

samedi 4 octobre

On se demande parfois comment se passait la vie quotidienne de ceux qui n'étaient pas directement exposés pendant les grandes secousses historiques. Nous connaissons maintenant la réponse : rien de spécial - si ce n'est, dans le fond (mais en continu), une légère vibration, grave et lugubre comme un solo de contrebasse.

dimanche 5 octobre

lundi 6 octobre


Pynchon se permet tout et parvient à tout faire passer. Pour le coup, on peut employer le galvaudé "hallucinant". Comment décrire l'effet produit sur le lecteur par ce roman ? C'est pratiquement impossible tant les repères habituels sont subvertis à notre insu. La plupart des critiques littéraires ne s'y sont pas trompés. Après avoir brodé sur la légende de l'auteur invisible, ils ont le plus souvent paraphrasé le texte de la présentation en quatrième de couverture (c'est sans risque, il est de Pynchon lui-même). On pourrait dire qu'il s'agit d'un grand roman anarchiste - au sens où Godard disait, après A bout de souffle, qu'il avait réalisé le film anarchiste dont il rêvait. Existe-t-il une forme esthétique de l'anarchie qui traverserait le champ de la modernité artistique ? Cela pourrait faire un beau thème de réflexion pour l'hiver.

mardi 7 octobre

Tiens! Un papier soigneusement pesé et calculé pour décourager tout lecteur potentiel de Contre-jour. "...rares sont ceux qui ont achevé ce pavé. En général, ils annoncent la page où ils ont flanché. Donner l’exacte mesure de l’effort exercé est leur façon de rappeler qu’ils sont méritants et de soulager leur conscience face à des gens qui ne leur ont pourtant rien demandé..."Dans les commentaires, deux membre du Club des lecteurs de Pynchon, Thomas et mido, viennent porter la contradiction avec un brio indiscutable : "Pour aimer Pynchon il faut aimer les livres, les mots, la littérature, l'imagination, le rêve, le vocabulaire, il faut aimer lire profondément, pas seulement sur un quai de gare ou entre deux spots de pub pour de la culture sous vide." Chacun se fera son opinion...

Pendant ce temps, "la Banque centrale européenne a alloué comme prévu 50 milliards de dollars au marché monétaire européen, ce qui n'a cependant pas satisfait les 59 banques commerciales qui participaient à l'opération et réclamaient plus de 90 milliards. " (Le Monde)

Vu : French Cancan (Renoir). Très bon moment.

mercredi 8 octobre

 

Je vais avoir du mal à articuler un propos cohérent ce matin. Heureusement, il y a ce cartoon rigolo des Ramones envoyé par R. et dont le titre est I Dont Wanna Go Down To The Basement...

jeudi 9 octobre

Exclusif ! La sortie de route de la bulle pilotée par des traders envapés ! Le plus grand hold-up financier depuis la naissance du capitalisme ! Une partie de bras de fer impitoyable entre les banques et les Etats ! L'Amérique vacille mais ne s'effondre pas (encore) ! Une mise en scène médiatique destinée à traumatiser les populations et à les solidariser de leurs maîtres ! Le basculement définitif dans un monde baudrillardien où les causes n'intéressent plus personne !

vendredi 10 octobre

"J'étais en train d'écrire des textes publicitaires pour des pneus de camion quand un ami m'a donné un exemplaire de poche de 'V'. Je l'ai lu et j'ai pensé, d'où est-ce que ça peut bien venir?". Comme Don DeLillo, les lecteurs se souviennent souvent avec précision du moment où ils ont découvert Pynchon.

samedi 11 octobre

Signalée par Troudair, une superbe série de road pictures pour illustrer l'adage selon lequel le trajet est plus important que la destination. Mais au fait, cet adage existe-t-il dans notre culture ? J'ai un doute.

dimanche 12 octobre

"...se demander quelle est cette société que nous sommes en train de quitter qui rend possible ce genre de chantage." Slavoj Zizek

next

Index-1-2-3-4-5-6-7-8-9-10-11-12-13

 

__________GFIV.net____________