lundi 6 juin

Je lis le classique de Goffman, et c'est le point de vue idéal pour regarder les suites du feuilleton "référendum" à la télé. Quel message cherchent à envoyer les acteurs devant les caméras, quels gestes incontrôlés les trahissent ? Dans la vie quotidienne, inutile de prétendre renoncer à vous mettre en scène puisque, de toute façon, vos interlocuteurs décodent et interprètent tout ce qui s'offre à eux comme un message, explicite ou implicite. Toute la gamme de la manipulation réside là. Avec un minimum de talent, et à condition d'y consacrer suffisamment de temps et d'énergie, vous pouvez faire croire à peu près ce que vous voulez.

mardi 7 juin

Dans un texte que je regrette, je craignais avoir fait le tour de la (bonne) musique fifties/sixties. C'était stupide. Rien qu'en venant explorer les pépites qui se trouvent ici, j'ai de quoi m'occuper jusqu'à la fin du monde (si elle n'arrive pas trop vite). PS : merci aux fans qui m'ont écrit, ça fait plaisir !

mercredi 8 juin

J'écoutais hier à la radio un scientifique proposer une nouvelle théorie du rêve, pas plus convaincante que les précédentes. A la limite, tout le monde a déjà compris, mais cela paraît tellement absurde de notre point de vue que personne n'y croit.

jeudi 9 juin

Je suis en retard, et en plus je n'ai rien à dire (ça tombe bien).

vendredi 10 juin

Les mots sont important ? Mouais, faut voir. Dans certains cas, lorsqu'ils sont maniés d'une certaine façon, par certaines personnes conscientes de certaines choses qu'elle désirent formuler clairement, tout en restant au plus près de la pensée. Les mots peuvent alors, parfois, produire certains effets retentissants. D'ailleurs, on voit très vite à la lecture d'un texte si l'on a affaire à des mots "armés", "agissants", ou à des slogans creux et vides.

samedi 11 juin

«For successful living» («Pour une vie brillante»), ce n'est pas un slogan creux, ça. Cela pourrait être la devise personnelle de notre fringuant premier ministre. La marque de jean Diesel, qui cherche à «s'éloigner du casual jean et se rapprocher de l'univers premium du prêt-à-porter" pourrait faire appel à ce modèle haut de gamme : Villepin côté jardin, livre de poésie à la main, plissant les yeux face au vent du destin. Idéal pour repositionner la marque en ciblant au-delà du trentenaire CSP + et en l'identifiant définitivement au successful living, quel que soit l'âge.

dimanche 12 juin

Prix de la meilleure lettre de fan du mois :

"je te lis (de temps en temps) et j'appréciais disons, le ton et la distance de ton écriture, et aussi (bonjour les projections peut être) l'idéalisme, la précision, la volonté de ton approche, l'espoir résolu de ta démarche . Ton blog m'évoque des mots révolutionnaires murmurés au creux de l'oreille, des appels à se lever chantonnés d'une voix douce .
celà écrit, je t'adresse ce mail non pas pour bafouiller ces mots dérisoires, mais pour te dire simplement merci pour le site philia on line que tu as signalé sur ta note du 27 mai . tu me l'as fait découvrir, et c'est beaucoup plus que ce que je pouvais espérer d'un blog.
qui sait ? nos petits pas font vraiment avancer tout le monde.
et donc merci,
Philippe (et j'ai l'âge d'avoir écouté Lou Reed à peu prés quand je passais mon bac - pfff - and i feel it in my veins and i guess that i just don't know !!!)"

lundi 13 juin

Vous avez vu tous ces radioblogs ? Il y a quelques années, le GFIV se serait jeté là-dessus comme un chien sur son os, peaufinant pendant des heures sa programmation. Oui, mais voilà, le temps a passé et nous avons maintenant d'autres manières d'occuper notre precious time. La playlist de juin, c'est juste comme ça, pour info.

Enfin une bonne nouvelle : l'agent spécial AIRHOLE est de retour !

mardi 14 juin

Je commence à y voir plus clair. Des comportements qui me paraissaient incompréhensibles deviennent limpides. Et du coup, il disparaissent de la banque mémoire, là où tournent en boucle les séquences mal décryptées. On se repasse les bobines, tant que le mystère n'est pas éclairci; et quand on a compris, tout s'enchaîne d'un coup (comme à la fin du film, lorsque le flic relie tous les indices).

mercredi 15 juin

Depuis deux jours, j'écoute du blues. C'est toujours bon signe. Régulièrement, je reviens aux vieux bluesmen. Dans une vision platonicienne, on pourrait dire que ce que j'aime, chez les contemporains (White Stripes, Black Keys) comme chez les classiques, n'est rien d'autre que l'écho affaibli d'une forme pure qui repose dans les vieux enregistrements de blues.

jeudi 16 juin

Ce qui m'attend ressemble fort à une journée de merde. Et alors ? S'il n'y avait que de la détente et du plaisir, on s'ennuierait. En même temps, je ne parviens pas à croire à cette idiotie. Milliardaire, je n'aurais jamais eu de problème pour occuper mon oisiveté.

vendredi 17 juin

Toute agression répond à la volonté de faire descendre l'agressé au niveau de l'agresseur. Si l'agressé voit venir la manœuvre et qu'il peut rester où il est, l'agresseur cogne dans le vide. Il n'est pas rare que le coup lui revienne violemment en pleine face. It's life, and life only.

samedi 18 juin

Une "mauvaise nouvelle" peut être accueillie avec soulagement. Premièrement parce qu'en tant que nouvelle, elle met fin à une attente; deuxièmement parce qu'en vertu de la loi du balancier, les choses ne peuvent pas toujours aller dans le mauvais sens; enfin parce que, quoi qu'il arrive, vous pouvez toujours écouter Exile on Main Street lorsqu'il fait trop chaud.

dimanche 19 juin

C'est quoi ce truc qui me colle le frisson chez les vieux bluesmen comme Mississippi Fred McDowell ?

lundi 20 juin

Comment est-il possible d'avoir comme seule préoccupation dans la vie les enregistrements des vieux bluesmen du Mississippi ? Je tiens à rassurer : il ne s'agit pas de ma seule préoccupation. J'ai même largement ma dose d'affaires à régler, de problèmes à démêler. Le blues, c'est juste la bande son - mais il est vrai que j'y accorde une grande importance.

mardi 21 juin

Rien.

mercredi 22 juin

Hier, j'ai oublié le journal. C'est très rare, exceptionnel même. Si je vous racontais le film de mes petites aventures (d'un intérêt limité) dans la vie "réelle", vous comprendriez aisément que j'avais des raisons d'avoir l'esprit un peu aware. Mais ce matin, je pète la forme. Tellement, que j'ai envie de vous faire écouter la chanson que j'ai entendue en me réveillant. C'est une reprise acoustique des Strokes. Enjoy it !

jeudi 23 juin

Flash Back : nous sommes en 77, à Paris. On ne parle pas encore de canicule mais il fait très chaud. J'écoute Mink Deville, Television, en boucle. Je m'ennuie sur mon lit. Je lis une critique (probablement dans Charlie Hebdo) qui me donne envie de découvrir l'auteur de romans noirs Jean-Patrick Manchette, dont le dernier livre vient de sortir. Je descend faire des courses au supermarché du quartier. Je passe au rayon "livres" à tout hasard et tombe sur Le petit bleu de la côte ouest. Je remonte fébrilement dans ma chambre, m'assoit sur le lit et me plonge dans le bouquin (la fameuse ouverture sur le périphérique et le jazz West-Coast). C'est l'un des grands chocs littéraires de ma vie. Aujourd'hui, quelques années plus tard, je suis devant mon ordinateur, il va encore faire très chaud, et je vous signale un texte remarquable qui dit à peu près l'essentiel, et avec le respect qui s'impose, sur Jean-Patrick Manchette.

Gallimard sort l'intégrale des romans (plus quelques raretés) dans la collection Quarto. Maintenant, vous n'avez plus d'excuses.

vendredi 24 juin

Comme ça, au détour d'une conversation off line, comme ce journal en génère parfois, une citation de Philippe Muray qui m'évoque une foule d'amis. "Objecteurs de substitution, rebelles de remplacements, succédanés de perturbateurs, ersatz de subversifs, séditieux de synthèse, agitateurs honoraires, émeutiers postiches, vociférateurs de rechange, révoltés semi-officiels, provocateurs modérandistes, leveurs de tabous institutionnels, insurgés du juste milieu, fauteurs de troubles gouvernementaux, émancipateurs subventionnés, frondeurs bien tempérés, énergumènes ministériels", le journal de Jane vous est spécialement dédié. With love and kisses !

samedi 25 juin

"C’est aujourd’hui, à l’échelle planétaire, une guerre de gangs et de tribus, commandités par les marchés de l’armement, du pétrole, de la narcopharmacie, de l’agroalimentaire, des biotechnologies, de l’informatique, des groupes financiers, des services parasitaires, de la pêche intensive, du commerce des êtres humains, du trafic d’animaux, du pillage des forêts." Raoul Vaneigem

L'autre jour, un type m'a montré sur un ordinateur, en vue par satellite, la fonte des glaciers en Asie. On voit nettement une zone de désertification, appelée à s'étendre irrémédiablement. Depuis, le reste me semble absurde et dérisoire. Tous les journaux télévisés devraient démarrer par des infos concernant les désastres irréversibles, les catastrophes annoncées, qui sont la conséquence directe de notre mode de vie, pour que chacun mesure bien ses choix. Après, on pourrait faire un référendum. Est-ce que ça vaut vraiment le coup ? Mais bien entendu, ça casserait un peu l'ambiance, le budget publicitaire, la relance de l'économie. Remplissez les chariots ! Encore un effort pour accélérer la fonte des glaciers et le réchauffement climatique ! Chinois, américains, européens : tous unis dans la destruction de la planète ! (Alors Jane ? Où est passé le fameux ton distancié ? C'est vrai. Je ferais mieux de m'occuper des dérapages hebdomadaires de Sarko. C'est plus rigolo, et au moins, cela ne prête pas à conséquence).

dimanche 26 juin

Visité l'exposition "Burlesques contemporains" au Jeu de Paume (Jardin des Tuileries, jusqu'au 11 septembre). Le burlesque, notion assez floue (pour ne pas dire vaseuse lorsque transférée au champ de l'art), renvoie essentiellement à la chute des corps, aux actions contrariées. On nous dit également, dans le texte de présentation, que la perturbation, l'interruption d'un processus ou d'un protocole figurent parmi les procédures burlesques pouvant renverser "le cours des choses". Lorsque qu'on se pointe pour prendre son ticket, on vous informe qu'une partie de l'exposition n'est pas visitable. La dernière salle a, nous dit-on au guichet, subit des dégâts lors des violents orages qui se sont, semble-t-il, abattus récemment sur Paris. Je passe sur les œuvres exposées. Toutes sont écrasées par l'installation géniale que représente la fermeture de la dernière salle. Il est vrai qu'elle a morflé. Le parquet est tout gondolé, éclaté par endroits. Le genre d'ambiance de dévastation trash que certains artistes se plaisent à reconstituer minutieusement. On ne peut pas approcher à cause des barrières de sécurité. Un panneau officiel transmet les excuses du musée et nous remercie pour notre compréhension (dans un style "officiel" souvent plagié par l'art contemporain). De loin, on aperçoit des œuvres à jamais hors d'atteinte. L'ensemble, de l'avertissement à la caisse à l'installation elle-même, est une parfaite réussite - dans le style burlesque, comme il se doit.

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