lundi 20 novembre

Le plus crispant, l'autre jour à la radio, c'était la jubilation obscène de Jérôme Jaffré (analyste politique, ancien vice-président de la SOFRES).

mardi 21 novembre

Que feraient les dadaïstes aujourd'hui ? Picabia distillerait les bons mots dans un blog, Duchamp serait interviewé par Guillaume Durand et Tzara tiendrait une chronique d'intellectuel médiatique sur France-culture. Ou peut-être inventeraient-ils des manières inédites de secouer la domination symbolique ? On peut toujours rêver.

mercredi 22 novembre

J'ai lu coup sur coup deux livres sur l'état du monde. Après quelques semaines de terreur apocalyptique provoquée par les ravages de l'hypercapitalisme, j'ai décidé de me concentrer à nouveau sur l'odeur des feuilles après la pluie. Sinon, j'ai entendu par hasard Jarvis Cocker en concert à la radio et c'était beau.

jeudi 23 novembre

Le nouveau James Bond a l'air plutôt réussi. Question action et scènes de bagarre, la campagne qui commence n'est pas mal non plus. A peine le temps de se remettre du duel en forme de jeu télévisé et on enchaîne sur une tuerie à l'UMP. Jusque là, rien à dire. C'est du travail de pro. Les mauvais coups de théâtre viendront plus tard.

vendredi 24 novembre

Depuis des années, j'avais la certitude que le magneto à cassette de ma voiture était hors service. Je me faisais à cette idée - du moins j'essayais. La radio, avec ses flashs infos en boucle et ses chroniques à deux balles, me laminait insidieusement le cerveau. L'autre jour, j'ai enclenché machinalement une cassette. Le magneto n'avait pas changé. C'était mon oreille, déformée par la perfection froide du numérique, qui ne savait plus entendre ce son voilé mêlé au bruit du moteur.

samedi 25 novembre

La météo se donne un mal fou pour présenter la moiteur ambiante avec le sourire. Il suffit de faire comme avant le dérèglement climatique, lorsque la douceur hors saison était, par sa rareté, un motif de réjouissance.

dimanche 26 novembre

"La vie n'était plus que conditions atmosphériques, on attendait dans une chaleur où les événements perdaient leur signification, le retour d'une fraîcheur douce et caressante comme une main de femme sur un front las." Francis Scott Fitzgerald, Les enfants du jazz

 

lundi 27 novembre

Décembre n'est même pas commencé et je me demande déjà comment tenir jusqu'à Noël. En le disant, ça va un peu mieux.

mardi 28 novembre

Je me traîne et me morfond sans raison. I've got the blues. Le fait d'avoir la crève depuis des mois, cela n'aide pas. Mais ce n'est pas une raison pour se répandre (nous ne sommes pas sur un blog). Quelqu'un, qui me connaît bien, vient de me suggérer que cette crève interminable pourrait bien être d'origine somatique. Il ne reste plus qu'à décrypter le langage des mouchoirs en papier.

mercredi 29 novembre

En attendant que l'intégrale du génial Black Hole tombe de la cheminée, voici un graphiste burnsien à la fois trash, soigneux, et délicatement malsain.

jeudi 30 novembre

Je croyais qu'en avançant, on avait de plus en plus de souvenirs. En fait, c'est le contraire. Le cerveau opère un tri impitoyable. Ils ne reste pratiquement rien - à part quelques concerts circa 76.

vendredi 1 décembre

Cinq minutes, pendule windows sous les yeux. La tasse est vide alors que j'ai encore besoin de caféine. La bonne nouvelle, c'est que pour la première fois depuis le début de ce long rhume malsain, je n'ai plus aucun symptôme bizarre.

samedi 2 décembre

Qui va regretter Libération et ses calembours, Le Monde et ses papiers insipides ? Nous n'étions pas attachés à ces quotidiens, dont la disparition paraît aujourd'hui inéluctable. Ce que nous aimions, c'était juste le fait de tourner les pages à une terrasse de café.

dimanche 3 décembre

"Une femme se promène souvent

Dans le jardin toute seule

Et quand je passe sur la route bordée de tilleuls

Nous nous regardons."

Guillaume Apollinaire, Alcools

 

lundi 4 décembre

Bernard Stiegler écrit comme un pied. Ses phrases, mal construites, sont pleines de néologismes imbitables. Des notes en bas de page nous invitent régulièrement à nous plonger dans son abondante bibliographie pour approfondir ses concepts. Mais à part ça, ce n'est pas le mauvais gars. Il propose de jouer le rôle de mécano spirituel du capitalisme, le réparateur ultime avant la panne finale. Pourquoi pas ? Cette position permet d'occuper divers postes institutionnels tout en éprouvant le frisson de la pensée critique.

mardi 5 décembre

" Sortir du déni sur l'alcool ". Où peut-on lire ça ? Dans le Monde, évidemment. Pourquoi seulement "sur l'alcool" ? La France est une spécialise du mensonge, de l'hypocrisie et du déni, avec ses notables cheloux et ses cadavres qui débordent du placard. De temps en temps, une réalité niée pendant des décennies lui pète à la gueule, mais globalement, elle s'en sort plutôt bien - contredisant au passage certains des principes fondamentaux du célèbre viennois.

mercredi 6 décembre

Je crois que, comme l'énonçait Picabia, il est en général vain de discuter avec les cons. Cependant, de temps en temps, il faut avouer que cela fait plaisir de prendre une fausse évidence bien partagée par le bon sens local et d'en démonter méthodiquement l'absurdité et la violence, jusqu'au bout. C'est un massacre qui ne coûte rien, qui ne fait de mal à personne, et qui ne sert probablement à rien. De la pure dépense gratuite.

jeudi 7 décembre

Au moment où l'on ressort les eighties pour remplir les caisses, j'ai retrouvé dans les archives du GFIV ce texte autobiographique de Joe le Gloseur. N'allez pas croire qu'il s'agit d'une histoire passée : nous y sommes toujours, mais le remarquons de moins en moins. La preuve ? Le retentissant silence médiatique autour du livre de François Cusset, qui écrit : "L'esprit des années 1980 est d'abord là, dans l'insidieuse naturalisation du changement : il devient aussi nécessaire que la mue des organes, aussi peu discutable qu'une catastrophe naturelle.».

vendredi 8 décembre

Dans un monde parfait, il n'y aurait pas de commentaires sur les livres. Juste la parole des écrivains qui parleraient de leur expérience, raconteraient d'où viennent les romans, comment ils naissent et se développent dans le mouvement de l'écriture, pour finalement prendre la forme définitive que découvrira le lecteur. Le numéro spécial du Magazine littéraire intitulé "40 ans de littérature" est entièrement composé d'entretiens. Il est parfait.

samedi 10 décembre

Réveil tardif, cerveau au repos. Pas envie de précipiter le redémarrage. Nous en resterons là pour aujourd'hui.

dimanche 11 décembre

" Au fond, j'étais toujours persuadé qu'on me reprochait quelque chose, mais je ne savais jamais quoi. Il m'est resté de cela un embarras persistant du geste et du sentiment, un mélange de prudence et de maladresse." Frédéric Berthet, Journal de Trêve

 

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